lundi 7 janvier 2008

INTRODUCTION

"(...) Et si l'on se disait que rien n'a aucune importance, qu'il suffit de s'habituer à faire les mêmes gestes d'une façon toujours identique, dans un temps toujours identique, en n'aspirant plus qu'à la perfection placide de la machine? Tentation de mort. Mais la vie se rebiffe et résiste. L'organisme résiste. Les muscles résistent. Les nerfs résistent. Quelque chose, dans le corps et dans la tête, s'arc-boute contre la répétition et le néant. La vie: un geste plus rapide, un bras qui retombe à contretemps, un pas plus lent, une bouffée d'irrégularité, un faux mouvement, la "remontée", le"coulage", la tactique de poste; tout ce par quoi, dans ce dérisoire carré de résistance contre l'éternité vide qu'est le poste de travail, il y a encore un temps, même monstrueusement étiré. Cette maladresse, ce déplacement, ce déplacement superflu, cette accélération soudaine, cette soudure ratée, cette grimace, ce "décrochage", c'est la vie qui s'accroche. Tout ce qui, en chacun des hommes de la chaîne, hurle silencieusement: "Je ne suis pas une machine!"."

Robert Linhart. " L'établi "

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